Plogoff chronique de la lutte. Le CLIN de Landerneau.
L’article ci-dessous est extrait du livre “Plogoff, un combat pour demain”. On y parle de l’activité des CLIN (comités locaux d’information nucléaire) et en particulier de celui de Landerneau qui a été à l’origine de la première association écologiste dans la commune.
Le CLIN de Landerneau avait en particulier pris la charge du journal “Nukleel”, le journal des CLIN. Pendant quatre ans, malgré les moyens rudimentaires à la disposition des rédactrices et rédacteurs, il a été diffusé entre 3000 et 5000 exemplaires. Lien essentiel entre les différents comités, c’est un témoignage vivant de la lutte.
Au moment où l’enquête publique va démarrer à Plogoff, jetons un coup d’œil sur les acteurs de la pièce. Au centre, le comité de défense de Plogoff et le conseil municipal. Autour, les Clin et Comités Plogoff mais aussi les associations de protection de l’environnement, les associations de consommateurs ainsi que la multitude de tous ceux qui, pour des raisons diverses, ont mis leur énergie au service de ce combat. En face, la machine politique et administrative, la préfecture, les forces de l’ordre.
Les Clin.
A juste titre, la publicité faite autour des longues journées de résistance de Plogoff a mis sur le devant de la scène la population de Plogoff, son comité de défense, son maire et son conseil municipal. Le rôle des Clin a été moins visible. C’était leur choix. Ils ont pourtant été un des facteurs essentiels du succès.
Qui sont-ils ? Après le CRIN de Erdeven (comité régional d’information nucléaire), les premiers CRIN de Cornouaille puis les Clin de Ploumoguer, Brest et Landerneau (comités locaux d’information nucléaire). Ils sont bientôt 70 à 80 comités couvrant toute la Bretagne et regroupés dans une coordination régionale. Chacun regroupe de 10 à 50 militants mobilisables à tout instant.
Leur première caractéristique est la jeunesse de leurs adhérents.
Les plus âgés ont autour de trente ans. Ils avaient entre 20 et 25 ans dans les années 68. Ils ont l’expérience des manifestations improvisées, des occupations d’usines et de bâtiments administratifs, des distributions de tracts, des collages d’affiches organisés dans l’urgence. Ils ont accompagné, en pensée et en actes, les travailleurs de LIP reprenant en main leur destin. Ils ont résisté à la militarisation avec les paysans du Larzac. Paysans, ils se sentent avant tout des travailleurs de la terre. Jeunes travailleurs et militants syndicalistes, ils ont secoué les vieilles routines des actions catégorielles et retrouvé la tradition des luttes anti-hiérarchiques. Ils attendent encore le second souffle de la fête qui, en 68, leur a embrasé l’imagination. Ils ont un métier, parfois de jeunes enfants. A 32 ans, ils apparaissent déjà comme les « vieux » du mouvement.
Les plus nombreux sont encore étudiants ou affrontent leurs premières années de “vie active”. Ils se sont rodés au hasard des mouvements lycéens qui, depuis 10 ans, entretiennent une agitation constructive. Ils ont connu des moments forts comme ceux de la lutte contre les “lois Debré” qui les ont vus défiler avec un entonnoir retourné sur la tête. Les plus jeunes sont encore lycéens. La catastrophe de l’Amoco Cadiz et les comités anti-marée noire ont été leur porte d’entrée dans la mobilisation antinucléaire.
Les Clin se sont organisés sur un mode « libertaire ». Ils ne sont pas déclarés en préfecture. En leur sein pas de conseil d’administration, pas de président, même pas de porte-parole. Tout se décide en assemblée générale. Les fonctions pratiques, secrétaire, trésorier, sont tournantes. Le même esprit structure la coordination régionale des comités : le secrétariat est confié à un groupe local renouvelé chaque année. Quand Plogoff est venu remplacer Ploumoguer en tête du palmarès des sites nucléaires, le Clin de Ploumoguer, riche de son expérience, s’est vu confier ce premier secrétariat régional. Quand l’enquête publique est venue concentrer la mobilisation sur Plogoff, le Clin de Plozévet, dans le Sud-Finistère a pris le relais. Cette organisation large, bien structurée, fonctionnant au consensus vivra sans heurt pendant toute la durée de la lutte. Son absence de représentation ” officielle ” sera un élément d’efficacité. Personne sur qui faire pression, personne avec qui négocier un compromis ” politiquement raisonnable “. Pas de longs et inutiles débats pour dégager une ” ligne politique “. Une seule volonté : s’opposer à la centrale. Une méthode : s’informer et informer.
Informez vous !
Une affiche de Alain Le Quernec, affichiste quimpérois, figure dans les collections de plusieurs musées d’art moderne. Elle lui a été demandée par le Clin de Landerneau (voir son histoire).
En gros plan, le visage d’un homme. Le flash qui l’éclaire suggère qu’il est déjà trop tard. En dessous, en bandeau, le même personnage dans l’attitude connue des trois singes de la tradition asiatique. L’un a les mains sur les oreilles, l’autre sur les yeux, le dernier sur la bouche. Surtout, ne rien entendre, ne rien voir, ne rien dire.
Le message au sommet de l’affiche n’est pas un slogan. Il invite à refuser la fatalité, à écouter, à regarder, à parler :
“Nucléaire, Informez vous !”
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