Christophe Winckler et la belle aventure de la coop des masques.

Par , 6 octobre 2021 13 h 44 min

​Président de la Coop des masques de Grâces, près de Guingamp (Côtes-d’Armor), Guy Hascoët a démissionné de ses fonctions lors du conseil d’administration du lundi 27 septembre 2021. S’il reste membre actif, la présidence est désormais assurée par Christophe Winckler, ancien dirigeant de Lessonia. (Ouest-France)

coop des masques.

Lundi 27 septembre 2021, lors du conseil d’administration de la Coop des masques de Grâces, aux portes de Guingamp (Côtes-d’Armor), Guy Hascoët a démissionné de son poste de président qu’il occupait officiellement depuis octobre 2020. Christophe Winckler, ancien dirigeant de Lessonia, lui succède.

« J’ai passé la main il y a une semaine, explique Guy Hascoët. Deux raisons à cela : il est temps pour moi de me reconcentrer sur mes autres activités et de repositionner le projet textile. »

Durant le premier confinement, l’ancien secrétaire d’État à l’économie solidaire avait été désigné par la Région Bretagne et le Département des Côtes-d’Armor pour porter le projet de la Coop des masques bretonne et solidaire. La Société coopérative d’intérêt collectif (SCIC), employant 24 salariés, a été inaugurée le 22 janvier 2021.
De grosses craintes en septembre

« J’ai passé plus de 100 jours au montage de ce projet entre avril et décembre 2020, précise-t-il. La Coop est arrivée un peu comme un Ovni dans ma vie, alors que mes activités de consultant se trouvaient au ralenti de par la pandémie. Cela a constitué un très gros challenge pour moi dans un délai très serré. »

Depuis janvier 2021, des millions de masques ont été fabriqués à Grâces. Mais, les stocks se sont accumulés et la trésorerie était menacée. D’où l’appel à la mobilisation lancé par Guy Hascoët, le 20 septembre dernier qui indiquait alors « nous avons un million d’euros de valeur dans le hangar ».

Un appel qui « a été entendu, souligne Guy Hascoët. Désormais, l’heure est au projet de fabrication du textile indispensable pour la confection des masques. » Et de signaler : « Christophe Winckler, qui me succède à la présidence, est dans ce projet depuis ses débuts. Pour ma part, je reste membre actif au sein de la Coop des masques. »

Bonne chance à Christophe pour ce nouvel engagement.

De bonnes nouvelles pour 2022.

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Bonne chance à Christophe pour redresser la barre du navire en difficultés qu’il a accepté de prendre en charge. Il nous a confié son objectif : maintenir l’emploi de personnes motivées et qu’il ne faut pas décevoir.

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Fabrication de masques. Dans les Côtes d’Armor, la Coop des masques victime de la concurrence chinoise et du manque de soutien des acteurs publics

Publié le 15/07/2022 à 19h30 Écrit par Manon Le Charpentier

Les salariés encadrés par les techniciens du fabricant de machines
Les salariés encadrés par les techniciens du fabricant de machines • © Jessica Le Badezet – La Coop des Masques

Sale temps pour la Coop des masques de Grâces, près de Guingamp, dans les Côtes d’Armor. Depuis le printemps, les commandes se sont écroulées, avec notamment une concurrence chinoise très agressive et les commandes publiques plus faibles que prévues. Des difficultés rencontrées par l’ensemble de la filière française.

Dans l’entrepôt de la Coop des Masques, à Grâces près de Guingamp, sont entreposés des centaines de cartons. A l’intérieur, deux millions de masques FFP2 et un million de masques chirurgicaux attendent de trouver preneurs. L’équivalent de trois mois de vente selon Patrick Guilleminot, le directeur de l’usine.

Les machines sont à l’arrêt, les équipes de production en chômage technique : 

Toute la production travaille une semaine sur deux au niveau des machines de manière à ne pas trop produire.Patrick Guilleminot, directeur de l’usine

” C’est de la trésorerie et la trésorerie c’est le nerf de la guerre, c’est ce dont on a besoin aujourd’hui. Cette trésorerie elle est là“, rajoute le directeur en pointant les cartons.

Un million d’euros de pertes

Résultat, des pertes qui s’élèvent à plus d’un million d’euro. Alors, après une assemblée générale des sociétaires la semaine dernière, les responsables de la Coop lancent ce vendredi 15 juillet un appel aux décideurs et aux collectivités pour les aider à redresser la barre.

Lancée en janvier 2021, l’entreprise coopérative et solidaire devait fournir chaque année 30 à 45 millions de masques totalement “faits en Bretagne“. Sa structure lui permet d’associer des collectivités, des associations, des entreprises, des citoyens et les salariés autour du projet de production. 

Dans la deuxième moitié de 2021 et jusqu’au mois de février de cette année, les machines tournaient à plein régime avec jusqu’à 300.000 euros de chiffres d’affaires par mois. Mais en mars, il est tombé à 50.000 euros. Les commandes se sont raréfiées.

Aujourd’hui nous ne recevons pas les commandes qui étaient prévues au départ”, s’agace Christophe Winckler, président du conseil d’administration de la Coop des Masques. 

Les hôpitaux ne représentent que 10 % de notre chiffre d’affaire alors qu’ils étaient nos principales cibles.Christophe Winckler, président du conseil d’administration de la Coop des Masques.

De la même façon, on travaille dans notre sociétariat avec des mutuelles, des groupes mutualistes qui gèrent des Ehpad et des tas d’organismes. Ils ont mis 300 000 € au capital mais n’ont réalisé que 20 000 € de commandes. C’est ridicule ! Les actes ne sont pas là.  

Des commandes souvent raflées par la Chine à des prix défiants toute concurrence : moins d’un euros la boîte de cinquante masques. 

C’est impossible à faire en France. Le prix minimal défini par la profession c’est 3 €. Pourtant beaucoup de nos sociétaire et d’organismes publiques continuent d’acheter en Chine.Christophe Winckler, président du conseil d’administration de la Coop des Masques.

Aurore Ruellan fait partie des 14 salariés de la Coop des Masques. Elle non plus ne comprend pas l’absence de commandes de certains sociétaires : On se demande pourquoi ils ont investi, pourquoi ils nous ont dit qu’ils croyaient en nous pour finir par aller voir ailleurs. On est vraiment déçus. Que des professionnels de santé qui ont eu une grosse pénurie pendant la crise aillent acheter en Chine, c’est difficile à accepter. On sait que ce n’est pas forcément de la bonne qualité, il y a des fongicides dessus, c’est fabriqué par des enfants, des prisonniers politiques.”

Si cela continue, nous et toutes les sociétés de production de masque, on va fermer. Et le jour où il y aura un autre pépin, il n’y aura encore plus personne en France. Aurore Ruellan, salariée de Coop des masques

Car le cas de cette Coop est loin d’être isolé. En 2020, de nombreuses entreprises ont été créées pour assurer l’autonomie française sur la fabrication des masques chirurgicaux et FFP2 :“On est monté jusqu’à une trentaine de société industrielles pour assurer la demande, rappelle Christian Curel, président du syndicat des fabricants français de masques (F2M). En 6 mois, on ainsi pu atteindre l’autonomie en terme de production de masques. Six mois plus tard, on était aussi autonome en terme de fabrication de matière première.” 

Aujourd’hui, à l’échelle nationale, l’activité de ces entreprises a baissé de 50 à 80 % et la moitié des machines produisant des masques est à l’arrêt selon ce syndicat.

Une clause de préférence européenne pour les établissements de santé

Depuis décembre 2021, les établissements de santé sont pourtant incités à acheter en France et en Europe leurs masques, gants et équipements de protection contre les contaminations. C’était l’objet d’une circulaire publiée par le gouvernement pour “garantir l’approvisionnement en cas de nouvelle pandémie mondiale“. Christian Curel appelle à ce que cette circulaire soit réellement appliquée. 

Seules les collectivités locales semblent s’être engagées auprès de la Coop selon Christophe Winckler : 

On a eu un très fort soutien non seulement pour la création de la coopérative mais on a également reçu beaucoup de commandes de leur part des différents départements, de la région, de certains Service Départemental d’Incendie et de Secours (SDIS). De gros efforts ont été faits.

Les salariés sont déçus mais encore combatifs, d’autant qu’une procédure de redressement judiciaire est toujours en cours jusque fin août. Sans trésorerie, l’avenir de la Coop des Masques serait fortement compromis.

Une histoire à suivre en lui souhaitant une fin heureuse.

12 octobre2022.

La Coop des masques. La fin d’une belle aventure humaine et solidaire.

Christophe Winckler nous fait savoir que l’entreprise est mise en liquidation judiciaire.

Ci dessous son communiqué.

En décidant la liquidation judiciaire de la Coop des Masques bretonne et solidaire, le tribunal de commerce de Saint-Brieuc sonne la fin d’une aventure humaine et solidaire hors du commun.

Cette aventure a démarré au mois de mars 2020 dès le début de la pandémie de covid 19. A ce moment tout le monde prenait conscience de l’impossibilité de fournir à la population des masques de protection sanitaire car nous avions auparavant désindustrialisé la France et en délocalisant l’usine de masques de Plaintel près de Saint-Brieuc.

Fort de ce constat, les membres fondateurs de la Coop des Masques ont été animés par la volonté de bâtir un outil industriel coopératif permettant de retrouver une souveraineté de production d’équipements sanitaires. Le choix du modèle économique retenu permettait d’être à l’abris de décisions de délocalisation. Cette démarche fût un succès car, dès le mois de juillet 2020, la Coop des Masques était fondée et pouvait commencer à produire au début de l’année 2021 une fois la mise en route des machines commandées en France.

Cependant, rapidement, elle a dû faire face à deux handicaps qui lui ont été fatals.

  1. Les importations de masques chinois sont toujours à un niveau très massif (95% en 2022). L’Etat lui-même est sans doute le premier fautif, car ses achats se font principalement en Chine. Ainsi la Coop des Masques a perdu le marché de la Préfecture de Paris au profit d’importateurs chinois (septembre 2022). La même décision avait été prise par l’armée en mai 2022.
  2. Plusieurs sociétaires de la Coop des Masques qui ont investi des sommes parfois importantes, n’ont pas confié leurs marchés à « leur usine » pour des raisons que nous ne comprenons pas. Le cas du groupe mutaliste Vyv (Harmonie mutuelle, MGEN, Arcade, mmg ….) qui était notre premier investisseur (300 000 euros), porte une grande part de la responsabilité de notre faillite.

L’analyse faite par la Coop des Masques est partagée par les principaux acteurs de la filière française. Elle montre qu’en aidant à la réindustrialisation de la France pour la production de masques, tout en favorisant le déferlement sur le marché des masques chinois à bas coût, sans même en contrôler ni la qualité ni les conditions sociales de production, l’Etat a provoqué de graves difficultés économiques conduisant à de nombreuses fermetures d’atelier ainsi que des faillites. C’est tout particulièrement le cas de la Coop des Masques qui a été encouragée à investir massivement et qui ne peut plus assumer ses dettes du fait de l’absence de commandes. En menant une politique aussi hasardeuse, l’Etat porte aussi une lourde responsabilité.

Sur le plan régional, il faut reconnaître que beaucoup de collectivités ont soutenus la Coop des Masques en nous confiant leurs besoins. Cependant nous portions nos espoirs sur l’organisation d’une table ronde qui avait été promise par la Région Bretagne pour le mois de septembre 2022. Cette table ronde aurait dû permettre de sensibiliser à nouveau le secteur de la santé ainsi que les milieux économiques (agroalimentaire) régionaux. Après avoir répondu favorablement à notre sollicitation, la Région n’a finalement pas donné suite.

Après la décision de liquidation judiciaire, le conseil d’administration de la Coop des Masques, pense avant tout aux 13 salariés qui vont se retrouver au chômage et vont devoir reprendre le chemin de la recherche d’un emploi. Ceci est d’autant plus désolant, que nous avions recruté en CDI, bon nombre de travailleurs qui avaient besoin de se réinsérer dans le milieu du travail. Nous souhaitons rappeler que leur mobilisation pour la Coop des Masques a été exemplaire.

Nous pensons aussi aux nombreux citoyens, artisans et entreprises qui ont soutenu et encouragé le projet. La Coop des masques avait 2067 sociétaires, dont près de 2000 citoyennes et citoyens. Ceux-ci croyaient à ce projet solidaire car ils ont investi chacun des sommes comprises en général entre 50 et 200 euros jusqu’à 10 000 euros. Nous imaginons que leur déception doit être immense.

Bien que l’aventure de la Coop des Masques se termine ce jour, nous tenons à souligner que le modèle coopératif qui a été utilisé est parfaitement pertinent et n’est en rien la raison de l’échec. Réunir autant d’usagers, de citoyens et de collectivités pour bâtir un outil industriel voué à la production d’équipements sanitaires stratégiques est un succès exceptionnel. C’est la démonstration qu’une entreprise solidaire est tout à fait indiquée pour garantir la souveraineté d’équipements sanitaires de nécessité publique sur un territoire comme la Bretagne (du moment qu’on lui passe des commandes).

Christophe Winckler

Président du conseil d’administration

Coop des Masques bretonne et solidaire

Le 12/10/2022

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